"La machine judiciaire est en faillite" : 3 questions aux fondateurs du think tank "Quelle justice ?"
L'ancien juge Jean-Philippe de Garate et deux avocats du barreau de Paris, Pascal-André Gérinier et Nicolas Duboille, s'associent pour lancer un "think tank" (laboratoire d'idées), baptisé "Quelle justice ?", pour appeler à la refonte de la justice. Entretien avec ses fondateurs.
Vous lancez un think tank. Pourquoi ? Quelle est sa vocation ?
"La machine judiciaire est en faillite. Ce n'est pas un mot, ni une opinion. C'est une évidence"
Nous sommes partis d'un constat. La machine judiciaire est en faillite. Ce n'est pas un mot, ni une opinion. C'est une évidence. Il suffit de voir les chiffres ! Et le constat est unanime, depuis le garde des Sceaux, le Syndicat national de la magistrature ou l’appel récent des avocats du barreau de Paris - avec une campagne qui qualifie notre système judiciaire de « préhistorique » - tous tirent la sonnette d’alarme. C’est bien qu’il y a péril en la demeure.
En revanche, n'oublions pas l'essentiel : pour tous les justiciables, le constat se décline de manière alarmante avec les délais, les erreurs, l'inhumanité, l'inconséquence qui grandit. La justice, faut-il le rappeler, n'appartient pas à une catégorie mais au peuple ! C'est une exigence républicaine et démocratique, simple à comprendre. Notre cercle de réflexion a pour but de jeter les plans de cette nouvelle justice pour tous les Français.
Quelle est votre stratégie pour que vos idées pèsent dans la campagne présidentielle ?
Le mot stratégie a quelque chose de martial. Nous pourrions "casser la baraque vermoulue". Mais finalement, ne perdons pas notre temps : la machine tombe d’elle-même. Nous sommes plus intéressés par les plans, les fondations de la nouvelle maison. Oui, bien sûr, nous provenons du parti, bien nommé, « Les Républicains » mais la justice est notre affaire à tous.
"Nous proposons l’élection des juges au suffrage universel, la séparation des activités de justice des activités de sécurité, la déjudiciarisation des contentieux de masse, la fusion des ordres juridictionnels administratifs et judiciaires,..."
D’un point de vue pragmatique, nous souhaitons partager nos idées de manière libre et ouverte sous la forme d’un programme de réformes à mettre en œuvre. Sur notre site*, vous pouvez déjà retrouver 16 mesures phares pour la refonte du système judiciaire français. Chaque mesure est fondée sur la constatation d’une défaillance particulière avec une proposition de réforme pour la corriger. Nous proposons, par exemple, l’élection des juges au suffrage universel, la séparation des activités de justice des activités de sécurité, la déjudiciarisation des contentieux de masse, la fusion des ordres juridictionnels administratifs et judiciaires,…
Vous proposez en effet plusieurs mesures pour réformer le système judiciaire. Quelle est selon vous la mesure la plus urgente à mener en France ?
Les juges, administratifs et judiciaires, réunis dans un même Ordre, seront élus au suffrage universel par les Français. Nous sommes tout sauf des novateurs. Cette mesure a été appliquée en 1791, abandonnée par la Terreur qui préférait - comme d'autres régimes qui lui ont succédé - les juges aux ordres. Mais des Républicains tels Gambetta et Aristide Briand l'avaient prônée en leur temps. Rendre la République aux Français ! Que les Français se réapproprient leur justice ! En démocratie, il faut le souligner avec force, la seule légitimité provient de l'élection. Nous sommes un peu loin du Parquet national nommé par le gouvernement.
*Le site du think tank "Quelle justice ?" : www.quellejustice.fr