L’e-mail : à envoyer avec « modération »
Qui ne vit pas un cauchemar lorsqu’après une journée d’absence du bureau, il faut lire - et traiter - 500 messages arrivés la veille, portant le nombre de messages stockés dans sa boîte e-mail à 15 000 ?
Qui d’entre nous n’a pas secrètement rêvé un jour d’un « crash » informatique qui remettrait tous les compteurs à zéro ?
Selon une étude réalisée en avril 2012 par les sociétés Sciforma et Zebaz :
- 81% des français estiment ne plus maîtriser l’agenda de leur journée de travail ;
- 89% disent travailler dans l'urgence alors que paradoxalement ils estiment seulement un quart des tâches comme réellement urgente ;
- 84 % avouent être perturbés par les nouvelles technologies (téléphones portables, réseaux sociaux, messageries, etc.).
Ce dernier point contribue en effet à la fois au sentiment d’urgence dans lequel on travaille, dans la mesure où l’instantanéité d’un e-mail implique nécessairement une réaction immédiate, et également à la sensation de perte de temps et de frein à la concentration puisque l’on est interrompu constamment.
D’autres études ont montré qu’en moyenne, le temps de concentration sans être interrompu ne dépasse pas 12 minutes, et que les utilisateurs les plus « addicts » consultent en moyenne leurs messages 40 à 50 fois par heure !
Alors, doit-on se contenter de subir la fatalité liée aux nouvelles technologies ou peut-on agir pour diminuer le nombre de messages internes échangés ?
Certaines entreprises tentent de nouvelles expériences, la SSII ATOS s’est fixé comme objectif d’éradiquer les mails internes d’ici deux ans, d’autres osent le « vendredi sans e-mail », en suggérant à leurs collaborateurs de « parler » directement à leurs interlocuteurs.
Sans s’engager dans un premier temps dans des solutions aussi radicales que celles décrites ci-dessus, on peut mettre en œuvre quelques bonnes pratiques d’utilisation du mail.
Avant de se précipiter sur sa messagerie pour transmettre un message à quelqu’un, voici les questions à se poser, de façon à être sûr que le mode « écrit » est le meilleur eu qu’aucun autre mode de communication n’est à privilégier :
- mon message concerne-t-il plusieurs personnes ?
- est-il urgent ?
- exige-t-il une réponse et de qui ?
- est-il confidentiel ?
- mon message est-il sensible ?
- comment risque-t-il d’être interprété ?
Dès lors, en fonction des situations, il faut choisir le bon mode de communication.
Il est important de bien déterminer à quelle personne ce message s’adresse (destinataire principal) et celles qui doivent en être informées (en copie), de façon à veiller à ne pas « inonder » le carnet d’adresse interne. Il arrive parfois que l’expéditeur envoie un mail à un nombre important de personnes en pensant que cela le déchargera de toute responsabilité au cas où un problème surviendrait par la suite. Mais en réalité, au contraire, si trop de personnes reçoivent le même message, le risque est qu’aucune d’elles ne se sente vraiment concernée.
S’il s’agit de fixer une réunion avec plusieurs participants ou de recueillir l’avis de plusieurs personnes, , le téléphone (ou un outil spécifique de gestion des réunions) est plus efficace. Il permet de coordonner les différentes réponses et d’adapter au fur et à mesure les propositions.
Cela évitera notamment les mails qui « tournent » avec le décalage des réponses de certains qui arrivent après une prise de position par d’autres !
Si le message est urgent, le téléphone est largement plus approprié, il permet de s’assurer directement que l’interlocuteur est informé, de connaître ses réactions et d’échanger, et dès lors, il n’y a plus lieu d’angoisser sur le fait que l’information est correctement transmise et traitée.
Si le message nécessite une réponse, il faut bien identifier la personne qui doit se positionner. Ensuite, on peut choisir de poser sa question par mail si elle est « fermée », c'est-à-dire si l’interlocuteur se voit proposer un choix parmi des réponses. Si la question nécessite une réponse développée, il sera peut-être plus efficace de se déplacer et de rencontrer la personne.
Si le message est confidentiel, il existe un réel danger à le transmette par e-mail (et même plus généralement par écrit). Tout d’abord, celui-ci pourrait être lu par hasard ou par indiscrétion de la part de quelqu’un qui entre dans le bureau. Attention également aux messageries partagées, aux mots de passe non confidentiels, aux droits et habilitations donnés à d’autres utilisateurs. Mais surtout, on connaît tous le « clic intempestif », et ce mail pourrait être transféré malencontreusement lors d’une mauvaise manipulation. Une information confidentielle doit donc plutôt être transmise oralement.
Si le message est sensible, par exemple s’il s’agit d’annoncer une mauvaise nouvelle, de négocier des objectifs, de faire part de critiques, etc., annoncer directement « en face à face » les informations est tout d’abord plus courageux, permet de mieux choisir les mots, de laisser plus de place à l’émotion (langage non verbal), de considérer la réponse de l’interlocuteur, d’échanger, de réajuster le message, d'apporter des informations supplémentaires, voire de rassurer.
Enfin, si malgré les alternatives proposées ci-dessus (téléphone et entretiens) le mail s’avère tout de même approprié, soignez la forme !
Le mail est déjà un mode de communication intrusif et assez agressif, il est donc important de se mettre un peu à la place du destinataire et d’anticiper ce qu’il peut ressentir ou interpréter. En conséquence, il est souhaitable de s’imposer quelques règles : formule de salutation au début et de politesse à la fin, objet précis et concis dans le titre, style fluide et clair, éviter les raccourcis « sms », vérifier l’orthographe, privilégier les questions fermées, indiquer le degré d’urgence.
En conclusion, avant de s’empresser d’utiliser sa boîte à lettres électronique pour transmettre de l’information, vérifiez que le mode écrit est le meilleur.
Même si l’e-mail reste une formidable invention et facilite souvent les échanges, il est aussi une source de perte de temps et de stress s’il est utilisé de façon trop systématique et mal géré.Il peut parfois inciter certains utilisateurs à se réfugier derrière l'écran pour éviter une communication en face à face.
Alors, pour tester le degré de dépendance aux e-mails dans votre entreprise, pourquoi ne pas tenter une fois l’expérience d’une journée sans e-mail et parler directement avec les autres ?