Militants ATTAC dans un magasin Apple : pas de dommage imminent
La vice-présidente du tribunal de grande instance de Paris a rejeté le référé formé par une société du groupe Apple contre l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (ATTAC). Quelque 70 militants de cette association avaient, le 2 décembre 2017, envahi le magasin Apple situé dans le quartier de l’Opéra, ce qui a conduit à l’évacuation et à la fermeture du magasin pendant quelques heures.
Dans le cadre de son action militante, ATTAC avait lancé, en 2017, une campagne visant à faire pression sur la société Apple afin que celle-ci s’acquitte, avant le 1er décembre 2017, d’une amende de 13 milliards d’euros qui lui avait été infligée, au mois d’août 2016, par la Commission européenne. Ces 13 milliards devaient être payés au fisc irlandais pour « avantages fiscaux indus ». La société Apple ne s’étant pas exécutée, les militants d’ATTAC ont manifesté aux abords et à l’intérieur de plusieurs magasins Apple, avec des banderoles, des chèques représentant le montant de l’amende, et maculant les vitrines de blanc d’Espagne.
La société Apple, sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile relatif à l’existence d’une dommage imminent demandait au juge des référés d’interdire à l’association ATTAC de pénétrer dans un magasin Apple, sous astreinte de 150 000 Euros par infraction, et de l’autoriser à mandater un huissier de justice afin de procéder à l’évacuation des magasins le cas échéant. De l’autre côté de la barre, l’association, qui soulevait l’incompétence du juge des référés, soutenait qu’en tout hypothèse, les militants n’avaient causé aucun dommage, ni aucune dégradation. Les clients n’avaient pas été empêchés d’entrer dans le magasin et d’y faire leurs achats.
Dans sa décision, le juge des référés, qui a retenu sa compétence, a considéré que la simple pénétration de militants dans le magasin, sans violence, sans dégradation et sans blocage de l’accès ne suffisait pas à caractériser un dommage imminent qui aurait justifié une entrave à la liberté d’expression et à la liberté de manifestation des militants. Il est relevé dans l’ordonnance que ces derniers agissaient d’ailleurs conformément à leur statut, dans le cadre d’une campagne d’intérêt général. Le juge n’a pas retenu que la carte postale, adressée par l’association à la société Apple et lui donnant rendez-vous « à la rentrée » était un élément permettant de conclure à l’imminence d’une nouvelle occupation de locaux. La sévérité du magistrat pourrait s’expliquer par la longue plaidoirie de la société Apple, qui était également représentée à l’audience par Antonin Lévy. Substituant son confrère Ivan Itzkovitch, celui-ci se serait longuement étendu sur la question de l’évasion fiscale qui n’était pourtant pas débattue lors de cette audience en référé. L’association ATTAC était représentée par Julien Pignon.
Ordonnance de référé