Lutte contre le blanchiment : les CARPA dans le viseur de Tracfin
Au cours d’une table ronde organisée le 14 octobre dernier à Paris à l'occasion du Congrès des avocats, le directeur de Tracfin, Bruno Dalles, a réaffirmé sa volonté d’obtenir que la cellule antiblanchiment bénéficie d’un droit de communication de certaines informations par les Caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats (CARPA). Une réforme qu’il souhaite voir aboutir à l’occasion de la transposition de la 4e directive européenne sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, dont l’ordonnance doit être publiée dans quelques semaines.
Un service secret et un mécanisme protecteur. « Je dirige un service secret, chargé de protéger les informations qui nous sont transmises », a déclaré Bruno Dalles, directeur de Tracfin, invité à participer à une table-ronde du Congrès des avocats, placé cette année sous le thème “L'avocat, le secret et la transparence”. « La déclaration de soupçon n'est pas une déclaration de certitude, on ne demande pas une preuve, on demande des indices », a-t-il rappelé. Pour les professions assujetties, « le mécanisme de la déclaration de soupçon est protecteur » puisque « l’origine de la source est protégée », « le système informatique est sécurisé », et « quand nous exploitons ces informations, personne n’en connaît l’origine, pas même l’autorité judiciaire ». Enfin, « celui qui fait la déclaration bénéficie d’une immunité », a-t-il ajouté. Et de conclure que le dispositif antiblanchiment actuel assure « un équilibre qui permet de concilier transparence, secret et régularité juridique ».
Un droit de communication. « Je ne suis pas surpris du peu de déclarations transmises par les avocats », a poursuivi Bruno Dalles. À cela plusieurs explications, selon lui : « le champ réduit de la déclaration de soupçon », « la structure des cabinets qui ne leur permet pas d’avoir des systèmes de contrôle » efficients, et le fait que « les CARPA assurent ce rôle de prévention sur les fonds qui transitent par elles ». Mais « les établissements financiers qui gèrent les comptes des CARPA n'exercent pas le même niveau de contrôle quand il s’agit de professions assujetties » et « la CARPA peut être instrumentalisée », a-t-il pointé, avant de déclarer : « on ne veut pas aller jusqu’à assujettir tout de suite les CARPA (…) mais il faut permettre à Tracfin d’avoir un droit de communication de certaines informations par les CARPA. » Une position que le directeur de Tracfin a déjà explicitée en avril dernier au cours d’une rencontre organisée par l’Union nationale des CARPA (UNCA).
Le compte à rebours est lancé. Concernant la transposition de la quatrième directive antiblanchiment, « l’ordonnance est prête », a-t-il déclaré, et sa publication est prévue début décembre prochain. Parmi les dispositions impactant les professions assujetties, le texte prévoit notamment « le renforcement de l’obligation de faire une analyse de risque », « une définition de la notion de personnes politiquement exposées » plus précise que celle qui figure dans la directive, « la création d’un nouveau fichier des bénéficiaires économiques », et enfin, « si le Conseil national des barreaux le valide, il y aura peut-être une disposition permettant de remonter le fil bancaire avec les CARPA ». « Le compte à rebours est lancé », a conclu Bruno Dalles.