Baromètre Day One : 1970 avocats associés ont changé de cabinet depuis 2006
1970 : c'est le nombre de mouvements d'avocats associés recensés par le cabinet de conseil en stratégie Day One depuis le lancement de son Baromètre des mouvements d'associés dans les cabinets d'avocats d'affaires en France en 2006. Soit 10 années de "bougeotte" au sein des firmes dont ressortent plusieurs lignes de force.
Première d'entre elles : c'est une moyenne de 200 associés qui, chaque année, décident de changer de structure. Une tendance qui a réellement pris son envol à compter de 2011, la moyenne des mouvements annuels étant de 169 avant et de 225 après (lire 2011 : l'année de tous les mouvements, LJA 1053, 30 janv. 2012, réservé aux abonnés). L'année 2015 a pour sa part comptabilisé 220 mouvements d’associés, soit une hausse de 5 % par rapport à 2014 (lire Cabinets d’affaires : les associés ont moins la bougeotte, 24 févr. 2015, accès libre).
Féminisation
Autre tendance notable : les femmes sont également touchées par le désir d'aller voir ailleurs si l'herbe est plus verte. En effet, si en 2006, elles ne représentaient que 22 % des mouvements d’associés, elles en ont constitué 35 % en 2015. Soit un record historique en proportion, mais aussi en volume (43). Cette évolution s'explique par la féminisation croissante du Barreau – plus de 65 % des promotions de l'EFB sont féminines – et le souhait des entreprises de voir les cabinets adopter les règles auxquelles elles se soumettent en termes de diversité. En témoigne le classement des 100 cabinets d'affaires parisiens en fonction de la parité, créé en 2014 par la commission DJ au féminin du Cercle Montesquieu. Un aiguillon qui pousse aujourd'hui les cabinets à laisser davantage de femmes accéder à l'association et à prendre des initiatives en ce sens. Ainsi, Ernst & Young Société d'avocats réfléchit à un processus d’association spécifique pour les femmes et Gide s'est fixé un objectif de 30 % de femmes associées à l'horizon 2015 (lire notre dossier Femmes juristes - Au pied du tableau d'honneur, LJA - Le Magazine n° 29, mars, avril 2014, réservé aux abonnés). À noter : contrairement aux idées reçues, ce n'est pas le droit social qui arrive en tête des pratiques féminisées, mais le droit de la santé avec 57 % de femmes associées.
Le corporate au sommet
Concernant les pratiques justement, c'est sans surprise le Corporate / M&A, expertise génératrice par excellence de missions pour les autres départements (social, fiscal, concurrence...), qui a connu le plus de mouvements au cours des 10 dernières années. Ainsi, 22 % des associés ayant bougé entre 2006 et 2015 possédaient cette spécialité, soit 442 avocats. Une exception durant cette décennie : l'année 2009 qui a vu la Finance arriver en tête des pratiques générant le plus de mouvements (lire Recrutement des avocats : vers une reprise du marché ?, LJA 939, 31 août 2009, réservé aux abonnés). L'année 2015, en revanche, n'aura pas dérogé à la règle, le corporate enregistrant à lui seul 23 % des mouvements d'associés. Parmi eux, des recrutements significatifs, comme celui de Marcus Billam par Darrois ou d'Arnaud Perès par Mayer Brown (lire À la recherche du modèle idéal, LJA - Le Magazine n° 39, novembre/décembre 2015, accès libre).
Un sésame vers l’association ?
Le crise étant passée par là et le marché devenant de plus en plus concurrentiel, force est de constater que l'accession à l'association est désormais un parcours semé d'embûches. Absence de possibilités, critères quantitatifs trop élevés en termes de développement commercial, multiplication des statuts alternatifs (counsel, of counsel, associé non equity, pré-associé...) : pour nombre d'avocats senior, pas d'autre choix que de changer de cabinet ou de créer leur structure pour endosser enfin le costume d'associé. Un scénario qui, entre 2006 et 2015, a concerné 28 % des mouvements, avec des pics à 34 % en 2010 et 2012, mais qui a atteint l'an dernier son plus bas niveau depuis 2006 (seulement à 24 %). "Une très large majorité (65 %) des mouvements ont concerné des avocats qui étaient déjà associés dans leur structure d’origine" , remarque le Baromètre Day One. Lequel conclut que non seulement "le changement de cabinet ne constitue plus le sésame vers une association" , contrairement à ce qui pouvait être observé précédemment, mais que cette baisse "témoigne de la réticence des cabinets à « créer » de nouveaux associés en provenance de l’extérieur" .
Le règne des nouveaux cabinets
Enfin, dernière tendance majeure observée par l'étude : l'attractivité des jeunes cabinets. 33 % des mouvements d’associés depuis 10 ans ont en effet eu lieu vers des structures créées dans les 24 derniers mois. "Ce phénomène reflète l’émergence des boutiques ou des cabinets de niche, créés par des associés issus des grands cabinets internationaux, qui disposent de l’expertise technique inhérente à ces structures, savent travailler en réseau ou à l’international et... ne sont pas contraints aux mêmes charges de fonctionnement" , explique l'étude. Durant les 10 dernières années, Day One a ainsi comptabilisé plus de 250 créations de boutiques, parmi lesquelles BDGS et Cabinet Bompoint en M&A, Arkwood en fiscalité patrimoniale, ou Baro Alto en contentieux. Pour le cabinet de conseil en stratégie, "les mouvements d’associés vers ces boutiques et cabinets de niche constitueront à n’en pas douter un enjeu majeur pour les cabinets en France dans les années à venir" . Un avis partagé par Antoine Morgaut, CEO Europe et Amérique Latine du cabinet en recrutement Robert Walters, qui, lors de la présentation de son étude de rémunération annuelle le 12 janvier dernier, avait estimé qu' "afin de garder les talents, les plus gros cabinets devront s’adapter » (lire Avocats et juristes : en 2016, small will be beautiful, LJA 1239, 18 janv. 2016, abonnés).
L. G.
Source : Baromètre Day One sur les mouvements d’associés dans les cabinets d’avocats d’affaires en France, 19 janv. 2016