Une nouvelle page se tourne-t-elle pour les investisseurs étrangers en Chine en 2024 ?
Depuis l’entrée de la Chine à l’OMC en 2001, et jusqu’à la veille du covid, la problématique était simple : comment profiter du marché chinois dans un contexte de croissance et d’ouverture progressive des différents secteurs d’activité aux étrangers malgré un protectionnisme de plus en plus marqué depuis l’arrivée de XI Jin Ping au pouvoir.
La donne est plus complexe depuis que la Chine a levé les contraintes sanitaires car l’économie privée chinoise n’a pas été soutenue pendant la période de confinement et se relève douloureusement.
Dans le même temps, les dirigeants des entreprises étrangères déjà installées en Chine n’ont pas pu s’y rendre pendant plusieurs années et ils ont désormais du mal à appréhender l’environnement des affaires qui a beaucoup évolué. Ils ne savent plus toujours comment satisfaire le marché local et comment déterminer le positionnement de leurs produits.
Cette période d’épreuve a rapproché les entreprises privées, qu’elles soient chinoises ou étrangères. Force est de constater que souvent les difficultés que peuvent rencontrer les sociétés françaises en Chine, qui font face à une réglementation souvent peu précise et peu prévisible, sont aussi rencontrées par les entreprises chinoises du secteur privé.
De sorte que la différence de traitement est moins celle qui concerne les entreprises étrangères vis-à-vis des entreprises chinoises, que celle qui concerne les entreprises privées vis-à-vis des entreprises publiques. Elles consistent souvent dans un accès non équitable au crédit et aux subventions publiques.
Cette convergence de situations, ajoutée à la qualité plus grande des partenaires chinois, a suscité le regain de l’intérêt pour les joint-ventures. Moins d’habilité sur le marché, plus de confiance dans le partenaire : c’est une dialectique qui pourrait rendre plus vulnérable l’investisseur étranger s’il n’était pas soutenu dans sa stratégie par une réglementation plus favorable des joint-ventures, entrée en vigueur le 1er janvier 2020, lui permettant, s’il dispose des 2/3 du capital, de contrôler la société commune, sans la contrainte d’un droit de veto de la partie chinoise minoritaire.
En outre, les joint-ventures sont de plus en plus souvent le fait de sociétés étrangères déjà installées et de partenaires qui se connaissent déjà depuis plusieurs années.
Par ailleurs, plusieurs mesures récentes sont venues renforcer l’attractivité du pays et la sécurité juridique apportée aux investisseurs étrangers, libéralisant de manière plus significative le secteur manufacturier, de la santé ou encore des télécoms.
Il faut également souligner la récente réforme visant à exempter de formalités certains transferts de données, tels les transferts de données de salariés pour les besoins de la gestion des ressources humaines au niveau des groupes, ce qui va soulager les groupes étrangers installés en Chine.
Dans ce contexte, il convient néanmoins de rappeler les contraintes auxquelles font face encore les entreprises françaises en Chine. La difficulté d’accès aux marchés publics persiste dans un contexte où le législateur chinois favorise les produits fabriqués localement (imposant dans certains secteurs, comme le domaine des dispositifs médicaux, de réaliser des investissements subséquents).
La Chine a beaucoup progressé sur le terrain de la protection de la propriété intellectuelle, la réglementation commence à être assez complète, mais l’application doit continuer d’être améliorée. La contrefaçon n’est pas considérée comme un « trouble à l’ordre public », sauf quand elle peut avoir pour conséquence une atteinte à la sécurité ou à la santé des personnes. Dans le même temps, force est de constater que les groupes chinois qui se développent sont désormais en mesure d’acquérir des technologies étrangères. Pourquoi alors contrefaire quand on peut acquérir la vraie technologie ?
Depuis plusieurs années, l’internationalisation des groupes chinois s’intensifie et tend à redessiner les contours des échanges commerciaux entre la Chine et l’Europe. C’est une opportunité pour les entreprises françaises. À la faveur des contraintes imposées par l’Europe (mesures d’ajustement carbone aux frontières par exemple et droits anti-dumping), les industriels chinois privilégient de plus en plus des implantations directes en Europe et développent de nouveaux types de partenariats avec les Européens.
Plusieurs entreprises étrangères qui ont gagné des clients chinois à partir de la Chine sont aussi emmenées par eux dans des pays tiers, comme le Moyen-Orient ou l’Europe de l’Est.
Aux portes de la Chine, c’est surtout l’Asie du Sud-Est qui bénéfice tant de l’essoufflement de l’économie chinoise que de l’internationalisation des groupes chinois. Les entreprises européennes implantées en Chine peuvent facilement s’y développer, y trouver des infrastructures de plus en plus développées, et des marchés de consommation prometteurs, comme au Vietnam ou en Indonésie. Aborder ces pays avec un carnet de commandes rempli grâce à ses clients chinois qui s’y délocalisent, constitue une opportunité sans précédent. T