Rôle de l’avocat dans le processus de professionnalisation de la médiation
Alors que le recours à la médiation n’a eu de cesse de se développer au cours des dernières années, le gouvernement souhaite encourager encore davantage le recours aux modes alternatifs des différends, dans le cadre du lancement des « Chantiers de la Justice » censés déboucher sur des projets de réforme au cours de l’année 2018. L’occasion pour les avocats de réévaluer leur rôle dans un processus de médiation et de conciliation qui modifie substantiellement la pratique judiciaire.
La Ministre de la justice, en lançant le 6 octobre 2017 les Chantiers de la Justice qui comprennent cinq objectifs prioritaires censés aboutir à un projet de loi au cours de l’année 2018, n’a pas fait mystère de son souhait que ces derniers soient l’occasion de voir se développer la médiation et la conciliation. Les pouvoirs publics, dans leur poursuite d’un travail d’amélioration et de simplification de la procédure civile, ont ainsi bien compris tout l’intérêt qui pouvait en résulter, notamment pour faire face à l’engorgement des tribunaux.
Ils suivent en cela un mouvement continu qui vise à recourir, de façon de plus en plus fréquente, y compris dans le domaine des affaires, à la médiation et à la conciliation, en tant que modes alternatifs de résolution des litiges, et ce pour des raisons qui sont dorénavant communément admises : rapidité, confidentialité, absence d’aléa judicaire, réduction des coûts inhérents à toute procédure, etc.
Les dernières réformes ont à cet égard largement renforcé, dans leur principe, le recours aux modes alternatifs de résolution des litiges, en contraignant les parties, dans un nombre croissant d’hypothèses, à y participer avant ou pendant l’instance. Il en va ainsi, par exemple, de l’article 56 du Code de procédure civile qui requiert que toute assignation en justice précise les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, mais également de l’article 860-2 du même Code qui autorise la formation de jugement du tribunal de commerce, une fois l’instance introduite, à désigner un conciliateur de justice, sans toutefois devoir recueillir l’accord des parties. La justification de ces évolutions réside en effet dans le taux de succès significatif des médiations et conciliations une fois entamées.
La médiation et la conciliation ont donc vocation à ne plus être des modes alternatifs de résolution des litiges mais à en faire partie intégrante, impliquant une modification en profondeur du rôle de l’avocat, tant en qualité de médiateur que de conseil des parties pendant la phase de médiation.
Aussi, il appartient aux avocats, dans le cadre d’une professionnalisation de la médiation et alors que la Loi de modernisation de la justice du 21e siècle n° 2016-1547 du 16 novembre 2016 a prévu qu’une liste des médiateurs serait dressée dans toutes les cours d’appel, de s’investir pleinement dans ce rôle de médiateur, susceptible de constituer un complément d’activité particulièrement utile dans un marché compétitif, attirant également d’autres professionnels du droit tels que les notaires, les huissiers, etc.
C’est à cet objectif que répond la création d’un annuaire des avocats médiateurs par le Centre National de Médiation des avocats, institué par le Conseil National des Barreaux.
Mais l’enjeu réside surtout pour les avocats dans leur capacité à trouver leur place en tant que conseil des parties dans un processus de médiation qui diffère, par nature, de l’approche contentieuse. Là où le rôle traditionnel de l’avocat contentieux est d’assister et de représenter un client sur la base d’une argumentation juridique soumise à un juge, seul décisionnaire, l’avocat doit se réinventer pour être en mesure de maîtriser le processus de médiation, notamment en ce qui concerne la gestion des règles de la confidentialité, l’assistance à la prise de décision et les suites de l’accord pouvant être conclu par les parties.
Autant de bouleversements qui seront nécessaires si les avocats souhaitent continuer à jouer un rôle de premier plan et exercer leur mission dans des différends qui trouveront de moins en moins leur dénouement en ayant recours à un juge.