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Nouvelles lignes directrices du Trésor pour les investissements étrangers en France : obligation de notification supplémentaire pour les opérations de M&A

Par Frédéric Puel, associé, Somya Habibi et Virginie Rebeyrotte, avocats, cabinet Fidal.

La Direction générale du Trésor (DGT) a publié, au début du mois, ses lignes directrices relatives au contrôle des investissements étrangers en France (IEF). Très attendue, cette publication apporte des éclaircissements bienvenus pour les investisseurs étrangers et leurs conseils

La loi Pacte de 2019, le décret n° 2019-1590 du 31 décembre 2019, l’arrêté du 31 décembre 2019, l’arrêté du 27 avril 2020 et l’arrêté du 22 juillet 2020 ont modifié significativement la réglementation relative au contrôle des IEF, notamment par (i) l’élargissement de la liste des secteurs d’activités entrant dans le champ d’application de la procédure d’autorisation préalable (pas moins d’une trentaine), (ii) la clarification du calendrier et du déroulé de la procédure et (iii) l’abaissement du seuil de déclenchement de la procédure de contrôle (25 % des droits de vote contre 33 % et, jusqu’au 31 décembre 2022, 10 % des droits de vote pour les prises de participations non européennes de sociétés françaises cotées). Rappelons l’existence du règlement européen n° 2019/452 du 19 mars 2019 prévoyant un mécanisme de contrôle européen des investissements directs étrangers. Les investisseurs sont donc également susceptibles de devoir déposer un dossier à la Commission qui pourra rendre un avis non-contraignant sur l’opération. Les lignes directrices prévoient trois critères cumulatifs pour identifier des IEF soumis au contrôle :

■■un investisseur étranger : Selon la DGT, les liens d’une chaîne de contrôle de l’investisseur sont appréciés par application de l’article L. 233-3 du code de commerce, qui rapporte également sur ce point que la présence d’une personne physique étrangère ou d’une entité étrangère dans l’ensemble de la chaine de contrôle suffit à rendre l’investissement éligible au contrôle. Une réflexion s’impose donc sur cet aspect pour les montages d’opérations de chaînes de contrôle, dans lesquelles il n’est pas rare d’avoir une entité étrangère parmi les investisseurs ;

■■une opération d’investissement dans une entité de droit français : Les lignes directrices viennent également confirmer une interprétation de la notion d’investissement, en soulignant que les créations d’entités en France, par un investisseur étranger, pour développer une activité en France (« greenfield ») ne sont pas soumises au contrôle, exception faite des opérations d’investissements ultérieures réalisées par l’entité nouvellement constituée ;

■■l’exercice par l’entité cible française d’une activité dite sensible qui participe à l’exercice de l’autorité publique ou de nature à porter atteinte à l’ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale : Les lignes directrices apportent désormais un éclairage sur les activités susceptibles d’être considérées comme sensibles en dehors de la liste des activités figurant à l’article R.151-3 CMF : ▪▪l’éligibilité peut être établie sur la base d’un faisceau d’indices en fonction d’un test de sensibilité comprenant plusieurs facteurs, tels que les clients de la cible, la nature, la spécificité et les applications des produits et/ou prestations fournis et des savoir-faire, la substituabilité des activités ou leur dangerosité ;

■■ l’éligibilité peut également porter sur des activités de recherche et développement lorsque celles-ci portent sur des technologies critiques ou sur des biens technologiques à double usage. La détermination de la sensibilité de ces activités ne dépend ainsi pas uniquement du chiffre d’affaires de la cible ou du montant de l’investissement. L’article R.151-7 CMF prévoit la possibilité de déroger à l’obligation de solliciter une autorisation préalable (ex : opérations intragroupe). Concernant le déroulement de la procédure, le dépôt des dossiers doit se faire auprès de la DGT (par courrier ou par e-mail). Le ministre dispose d’un délai maximal de 75 jours ouvrés pour se prononcer sur une demande d’autorisation.

Les lignes directrices soulignent que l’investisseur et l’entité cible sont tenus d’apporter des informations au ministère, sans pouvoir y faire obstacle en invoquant le secret des affaires. La réalisation d’un IEF sans autorisation préalable du ministre chargé de l’Économie est frappée de nullité. Le ministre peut également prendre des mesures de police, le cas échéant sous astreinte, des mesures conservatoires et des mesures de sanctions pécuniaires1. Le ministre peut délivrer une autorisation simple ou une autorisation sous conditions ou un refus, étant précisé que l’absence de réponse dans le délai précité vaut rejet de la demande. Ces lignes directrices de la DGT bien qu’elles ne lui soient pas opposables rassureront les investisseurs. Toutefois, davantage de précisions auraient pu être apportées, notamment en ce qui concerne le rachat d’activités sensibles.