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Loi Sapin II - À propos du dispositif de lutte contre la corruption et du risque associé

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES
par Ludovic Malgrain, associé, Jean-Lou Salha, counsel, White & Case (point de vue publié dans la LJA n°1290 du 20 février 2017)
Le nouveau cadre répressif tel qu’envisagé par la loi Sapin II du 9 décembre 2016 en matière de lutte contre la corruption au sein des entreprises semble constituer une forme de déclinaison en cette matière du cadre imposé en matière de contrôle interne aux entreprises du secteur de la banque par l’arrêté du 3 novembre 2014.





Nul doute que l’expérience tirée de près de vingt années de mise en place / revue de procédures internes en cette matière au sein des établissements bancaires et celle tirée de l’assistance aux contrôles et missions d’inspections menées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pourront éclairer les différents intervenants chargés de la mise en place d’un tel dispositif ou poursuivis à ce titre.
Au-delà de la création de l’Agence Française Anti-Corruption, qui pourrait être le pendant de l’ACPR, le dispositif décrit en matière de lutte contre la corruption procède de la terminologie utilisée en matière de lutte contre le blanchiment (conformité, cartographie des risques, contrôle interne) ; certains aspects de procédure sont aussi communs : visite des locaux, pouvoir d’injonction de mise en conformité, délit d’obstruction à l’exercice des fonctions de l’agence.

Le dispositif décrit en matière de lutte contre la corruption procède de la terminologie utilisée en matière de lutte contre le blanchiment


Le texte, dont on attend la publication des décrets d’application entre février et avril 2017 selon l’échéancier officiel, prévoit pour juin 2017 la mise en œuvre d’un programme de conformité, au travers notamment d’un code de conduite ; d’un dispositif d’alerte interne ; d’une cartographie des risques de corruption ; de procédures de vérification de clients, fournisseurs et intermédiaires ; de procédures de contrôle comptable ; de formations ; d’une politique de sanctions disciplinaires.
Ce n’est pas tant l’ensemble des mesures prescrites qui semble innovant, la plupart étant déjà mises en place au sein des entreprises assujetties, mais la « pénalisation » de l’absence ou insuffisance d’un tel dispositif par une sanction pécuniaire de 200 000 euros pour les dirigeants personnes physiques et un million d’euros pour la personne morale.
Partant, se pose la question du « pénalement responsable » de ce nouveau manquement « non intentionnel » : pourra-t-il s’agir d’un délégataire de pouvoirs disposant de l’autorité, des moyens et de la compétence nécessaires à la mise en place et au contrôle d’un tel programme ? Ou ce domaine sera-t-il jugé non délégable car ressortant du pouvoir propre du chef d’entreprise, comme la jurisprudence a pu le juger en matière de communication financière ou de présidence des institutions représentatives du personnel, afin de marquer l’importance attachée à la lutte contre la corruption en exposant le représentant légal ?

Ludovic Malgrain, associé, Jean-Lou Salha, counsel, White & Case
anticorruption loi Sapin