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Fonds d’investissement : vers une refonte de SFDR ?

Par Diane Campion de Poligny, associée et Pia Sabatier, cabinet DLA Piper

Depuis l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2019/2088 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers dit « SFDR » en 2021, les discussions sont en cours sur l’évolution à venir de la réglementation applicable aux fonds d’investissement en matière ESG.

De septembre à décembre 2023, la Commission Européenne a lancé des consultations sur le niveau 1 de la réglementation, avec pour objectif de recueillir les retours des différentes parties prenantes sur l’application du texte et d’identifier les lacunes potentielles, en se concentrant sur la sécurité juridique, la facilité d’utilisation et sa capacité à jouer son rôle dans la lutte contre le greenwashing.

Le 3 mai 2024, la synthèse des retours des 324 participants a été publiée par la Commission européenne. En ressort que les objectifs généraux de SFDR bénéficient d’un large soutien, mais les avis sont partagés quant à l’atteinte des objectifs au cours des premières années de mise en œuvre. Une cohérence accrue du cadre général de la finance durable et des différents textes applicables au niveau européen est demandée dans les réponses communiquées. Quant à la catégorisation, les participants sont partagés quant à la création d’une classification refondue avec de nouveaux critères, ou le maintien de la classification actuelle autour des articles 6, 8 et 9 avec une clarification et/ou ajout des critères. La question sur l’avenir de SFDR et les étapes à venir est désormais ouverte.

La position retenue par l’AMF
sur la révision de SFDR

L’Autorité des Marchés Financiers a de son côté publié en février un résumé de ses propositions et préconisations pour orienter les travaux initiés par la Commission Européenne.

Dans ce contexte, l’AMF préconise la mise en place d’un nouveau cadre plus clair et simple en introduisant des catégories de produits fondées sur des critères minimaux objectifs non sujets à interprétation permettant d’identifier et de comparer les produits financiers à la différence du système de catégorisation SFDR actuel où certains concepts, tels que l’investissement durable, ne sont pas précisément définis.

La non-conformité d’un produit financier appartenant à une catégorie sans en satisfaire les critères minimaux devrait être considérée comme une infraction à la réglementation, et pouvoir faire l’objet de sanctions de l’AMF.

L’AMF propose de remplacer l’architecture actuelle par quatre nouvelles catégories : solutions environnementales, solutions sociales, transition climatique, filtres non-financiers. Et elle détaille les critères qu’elle propose pour chacune.

L’AMF préconise enfin de rationaliser et recentrer les informations publiées au niveau des fonds d’investissement plutôt qu’au niveau des sociétés de gestion ; considérant qu’il est peu certain que les investisseurs consultent les informations relatives à la durabilité publiées par exemple sur les sites Internet des sociétés de gestion.

L’encadrement des noms de fonds utilisant des termes liés à l’ESG ou au développement durable

En parallèle de cette consultation, le 14 mai 2024, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) a publié son rapport final sur les Lignes directrices sur les noms de fonds utilisant des termes ESG ou liés au développement durable. Ces lignes directrices visent à fournir aux gérants de FIAs et d’OPCVMs des critères clairs pour évaluer leur capacité à utiliser les termes se rapportant à la transition, à l’ESG, à l’impact ou encore à la durabilité dans la dénomination des véhicules d’investissement. Le nom est en effet le premier élément d’information reçu par les investisseurs et l’ESMA souhaite les protéger contre les allégations non fondées ou exagérées qui pourraient orienter leurs décisions d’investissement.

En pratique, l’ESMA demande notamment un seuil minimum de 80 % d’investissements répondant aux critères dans le domaine considéré, ainsi que l’exclusion d’investissement dans certains domaines d’activité.

Néanmoins, si les fonds existants auront 6 mois supplémentaires pour s’y conformer, le texte ne prévoit pas d’exception à l’application pour les fonds ouverts qui ont besoin d’une importante poche de liquidité, ou pour les fonds fermés dont la période de souscription est déjà close.

L’AMF devra informer l’ESMA de sa volonté de se conformer ou non au texte dans un délai de 2 mois suivant la publication. T

D. Campion de Poligny