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Pierre Mudet voit loin

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES

Agé de 44 ans, Pierre Mudet est président du cabinet Ginestié Paley-Vincent depuis quasiment un an. Sa nomination a été naturelle, car l’avocat a toujours été très investi dans la gestion de la maison au sein de laquelle il exerce depuis déjà quatorze ans. Et il constitue d’ailleurs un véritable atout pour celle-ci, car l’associé a ceci de distinctif qu’il a longtemps pensé et analysé l’évolution du métier et du marché. Rencontre avec un avocat qui parle d’avenir.

Pierre Mudet est un homme réfléchi et discret. Il prend le temps d’observer et de toujours analyser, avant de parler. « J’ai un caractère posé, constant », annonce-t-il. Pourtant, ses racines maternelles sont corses, lui fait-on remarquer… Il sourit, avant de décrire, les yeux rêveurs, la montagne sur son île et sa bergerie dans laquelle il aime se retrouver en famille chaque été. « Mes deux filles sont mon pilier de stabilité, elles me ramènent au réel quand je rentre le soir à la maison », confesse-t-il. Car la journée, son énergie est tournée vers son cabinet. « Je suis proche de mes équipes, explique-t-il. Je les remotive quand il faut et je les rattrape quand ils vont vite ». Parmi la multitude de collaborateurs qu’il évoque, le nom de Pierre Cougnenc revient à plusieurs reprises. « C’est vrai, admet-il lorsqu’on le lui signale. J’accompagne Pierre depuis ses débuts. Et il fait partie de ceux qui m’ont fait évoluer ». Le collaborateur raconte : « J’ai rencontré Pierre Mudet lors de mon premier entretien au sein du cabinet et j’ai rapidement travaillé à ses côtés sur plusieurs dossiers d’envergure. Il m’a fait confiance, m’a aidé dans mon développement et m’a très vite introduit auprès des clients. C’est à travers les tâches qu’il m’a confiées que j’ai été témoin de son évolution au sein du cabinet et de son engagement pour la maison et ses clients ». L’un d’entre eux, Augustin Neyra, CFO de The Talent Club of Companies, a très vite noté cette alchimie entre les deux avocats : « Il y a une vraie confiance entre eux. Pierre Mudet a une vraie attention pour ses collaborateurs et ne craint pas qu’ils prennent la lumière à côté de lui. Il accompagne Pierre Cougnenc dans son épanouissement professionnel et le guide pour devenir un excellent avocat ».

Technicien du droit

L’associé le reconnaît : « Il m’est naturel de conduire les collaborateurs dans leur évolution de carrière, puisque moi-même j’ai eu la chance d’être accompagné par des professionnels incroyables ». Et il raconte ses débuts, à l’université de Toulouse, où l’élève était pour le moins studieux. Après l’obtention d’un DEA de droit des affaires et d’un mastère de droit et management (HEC/ESCP Europe, 2003), Pierre Mudet se lance dans une thèse. Son thème de réflexion : « La protection de l’acquéreur de droits sociaux ». Le droit des sociétés est donc la base de sa formation technique, mais il ne s’est pas arrêté là. Car en parallèle de ses recherches doctorales, il intègre le cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats, en qualité de salarié, au sein de l’équipe corporate. Il y rencontre l’associé Alain Couret, qui est par ailleurs professeur agrégé à l’université Paris 1. « Alain a été le pilier de ma construction technique, précise Pierre Mudet. Jean-Christophe Vidal, autre associé du cabinet, m’a fait tout de suite confiance et m’a accompagné pour dépasser mon expertise première et m’orienter vers le droit boursier et les opérations de capital market ». Avec ce dernier, il signe d’ailleurs, en 2011, l’ouvrage de référence Communication financière, publié aux Éditions Francis Lefebvre, et dont l’objectif est d’apporter des réponses pratiques aux sociétés cotées sur Euronext ou Euronext Growth pour la préparation et la diffusion de leur publication financière.

En exerçant au sein du cabinet, il bénéficie de son immense base de documentation juridique qui lui permet de gagner du temps dans ses recherches. D’autant qu’il sent une certaine pression de ses associés pour mettre un point final à sa thèse et devenir avocat. Il met alors un coup d’accélérateur à son travail qu’il termine en trois mois. L’année 2006 sera celle de la soutenance. Il obtient une mention très honorable.

De conseil juridique à partenaire des clients

En 2010, Pierre Mudet est enfin inscrit au barreau de Paris. Au sein du cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats, il dit avoir appris à délivrer un avis juridique. « Mais je savais que je devais connaître d’autres expériences, pour découvrir plusieurs façons d’approcher le métier », raconte-t-il. Il postule pour rejoindre le cabinet Ginestié Paley-Vincent. Il explique : « Le cabinet a toujours été positionné aux côtés des directions générales et des entreprises familiales. C’était une clientèle que je ne connaissais pas et une façon d’exercer nouvelle pour moi, car elle requiert une forme d’intimité avec le client tout en impliquant une exigence de qualité et de disponibilité. Il faut comprendre sa stratégie, ses enjeux et ses contraintes ». Et porté par ses convictions mûrement réfléchies, il enchaîne : « Aujourd’hui, je ne délivre pas seulement du droit. Je me sers du droit dans ma réponse, qui doit d’abord être opérationnelle. L’évolution actuelle du marché impose aux avocats de repenser leur rôle, qui doit être d’accompagner leur client pour faire face à leurs défis. Et pour cela, il faut les connaître parfaitement, les comprendre et les porter avec eux ».

Le collaborateur Pierre Cougnenc est le témoin au quotidien de cette proximité construite avec les clients : « L’une des grandes qualités de Pierre Mudet est de ne jamais lâcher la main de ses clients. Il fait preuve d’empathie en les conseillant, les écoute, se met à leur place et les rassure. Et surtout, dans les situations complexes, ou lors de négociations tendues, il fait preuve de calme et d’assurance ».

Nicolas Huenic, directeur juridique droit des sociétés et droit boursier de Hermès International, le confirme : « Son approche réfléchie et nuancée, associée à son esprit audacieux, fait de lui un véritable partenaire de confiance, capable de fournir des solutions juridiques adaptées et pertinentes ». Il poursuit : « Son expertise se distingue par une compréhension aiguë des enjeux pratiques auxquels font face les entreprises. Pierre sait en effet conjuguer les transitions concurrentes auxquelles ces dernières sont confrontées tout en conservant un œil attentif sur les impératifs légaux et opérationnels. Travailler avec Pierre est non seulement un plaisir, mais également une garantie d’excellence dans un environnement complexe et en constante évolution ».

Marqué par les valeurs du cabinet

Au fur et à mesure des dossiers, Pierre Mudet trouve sa place dans le cabinet Ginestié Paley-Vincent. Bien sûr le fameux dossier boursier Hermès-LVMH lui met le pied à l’étrier. Aux côtés de Philippe Ginestié, qui conseille la maison du faubourg Saint-Honoré depuis toujours, il s’investit durant quatre ans dans chaque étape de la bataille et jusqu’à la célèbre médiation menée, d’une main de maître, par Frank Gentin, alors président du tribunal de commerce de Paris. « C’est à partir de ce dossier que j’ai compris la place centrale que doit tenir l’avocat dans la stratégie de ses clients. Il n’est pas qu’un homme de droit, il doit comprendre les enjeux de l’entreprise, sa gouvernance, ses objectifs pour l’avenir. Ces quatre années ont constitué une formation accélérée pour passer d’un statut d’avocat technique à celui de professionnel polyvalent et plus complet », raconte-t-il.

En 2016, il est coopté au rang de counsel et il s’engage alors dans une dynamique de développement de clientèle. Il rencontre les associés fondateurs de The Talent Club, des anciens d’Adecco qui ont monté une société holding financée par du capital privé, et qui acquiert des participations majoritaires au sein d’acteurs du talent management. Aujourd’hui Pierre Mudet les accompagne dans la plupart de leurs investissements en France et à l’étranger. « Il a de grandes qualités, témoigne Augustin Neyra, le CFO du groupe. Il a une capacité à simplifier les sujets complexes et à apporter des solutions rapides. Il sait sortir des questions juridiques techniques pour proposer un conseil plus large au client ».

Il gagne également la confiance de Laurent Milchior, co-gérant du groupe de prêt-à-porter et de lingerie Etam Développement, qui est une entreprise familiale constituée en société en commandite par actions – une forme juridique sur laquelle Pierre Mudet a longuement travaillé pour plusieurs de ses clients, tout comme sur les sujets de gouvernance sur lesquels il a une vraie valeur ajoutée.

« Je suis marqué par les valeurs du cabinet, qui m’ont été transmises par Philippe Ginestié auprès duquel j’ai beaucoup appris », dit-il. Et c’est très naturellement, à quarante ans, qu’il est nommé associé de la maison. « La promotion au rang d’associé est le résultat d’un comportement préalable de l’avocat, pense-t-il. Le counsel devient associé parce qu’en réalité, il se comporte déjà comme tel. Il participe à la dynamique du cabinet, au développement des clients et à la conquête de nouveaux marchés ».

De grandes ambitions

En 2020, Pierre Mudet intègre le comité de direction du cabinet et son comité de pilotage. Par curiosité, mais surtout par goût, il se plonge alors dans la mécanique du cabinet. Il analyse son évolution, les grandes étapes à franchir, les perspectives à donner aux équipes. « Le soir, il arrive de nous retrouver et d’échanger sur l’avenir du métier d’avocat, sur l’association, mais aussi plus généralement sur le marché des cabinets d’affaires, raconte Pierre Cougnenc. Pierre Mudet discute volontiers des évolutions de marché et son analyse fédère les équipes ».

Lorsqu’il a été nommé président de Ginestié Paley-Vincent, en mai 2024, c’est son ouverture d’esprit et sa capacité de réflexion sur l’avenir des cabinets qui ont notamment été recherchés. Car le marché connaît une réorganisation assez brutale. Les fusions entre firmes internationales visant à créer des mastodontes peuvent être inquiétantes pour les cabinets français indépendants. Et le développement de l’IA achèvera, d’ici quelques années, de faire le tri dans les structures qui n’auront pas pris le tournant de la modernité. « De profondes réorganisations de cabinets vont avoir lieu dans les prochains mois, annonce-t-il. Le marché est appelé à se réduire et les exigences des clients, dotés en interne d’anciens avocats et plus équipés que la plupart des cabinets en matière de nouvelles technologies, vont croître ». Mais il en est persuadé : il y a une place pour les structures agiles qui sont tournées vers la valeur ajoutée qu’elles peuvent apporter dans les dossiers. « Philippe Ginestié a créé, dans les années 90, une structure indépendante, aujourd’hui baptisée Gino Legaltech, qui est une solution technologique pour automatiser la gestion des contrats. Notre cabinet l’utilise régulièrement pour accélérer le traitement de certaines tâches comme l’organisation des assemblées générales des groupes cotés. Ce traitement automatisé permet à nos équipes de rester concentrées sur les sujets de technicité juridique », explique l’associé. Et l’IA est un outil, selon lui, pour permettre aux structures françaises de se démarquer dans un environnement toujours plus compétitif et exigeant. Le président de Ginestié Paley-Vincent a de grandes ambitions pour sa maison.