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« Les compliance officers sont perçus par les entreprises comme des empêcheurs de faire du business en rond »

Par Chloe Enkaoua

D’une pierre, deux coups : le cabinet Hogan Lovells a publié une étude baptisée "Garder le cap - Piloter le risque de corruption" et lancé en parallèle un outil d’auto-évaluation en termes de compliance à destination des entreprises, tous deux accessibles via le microsite http://www.hoganlovellsabc.com/. Présentation avec Antonin Lévy, associé responsable de la pratique Droit pénal des affaires du cabinet à Paris.

Pouvez-vous présenter l’outil comparatif développé par Hogan Lovells ?
Antonin Lévy : Il est né de discussions bimensuelles entre associés de notre pratique Investigation en France, au Royaume-Uni, en Asie et aux Etats-Unis. En comparant nos pratiques et les récents développements dans nos juridictions respectives, nous avons conclu qu’il serait intéressant de mettre en place un produit fini non seulement utile pour nous, mais aussi pour nos clients. Concrètement, il s’agit d’un "benchmarking tool" accessible à tous, un questionnaire à choix multiples permettant aux entreprises d’avoir une idée de la force de leur programme de compliance, de voir, le cas échéant, sur quels aspects il devrait être amélioré, et de se situer dans le marché par rapport aux autres acteurs.

En parallèle, le cabinet a publié une étude sur la lutte contre la corruption au sein des entreprises. Que faut-il principalement en retenir ?
A. L.
 : Sur les 600 directeurs juridiques et responsables de la conformité interrogés à travers le monde, nous avons constaté qu’un compliance officer, qu’il soit à Paris, à Hong Kong, à Washington ou à Londres, est confronté aux mêmes doutes et aux mêmes difficultés. Il doit également faire face aux mêmes challenges, le principal étant que la lutte contre la corruption ne soit plus vue comme un obstacle à la création de valeur au sein de leur entreprise. Ce sentiment est très globalement partagé dans les différentes juridictions.

L’étude rapporte que 59 % des entreprises font passer les bénéfices avant la prévention : comment l’expliquez-vous ?
A. L. 
: Dès lors que la réglementation s’est durcie, le droit a été vu comme un frein au business au sein des entreprises. La compliance en étant un dérivé relativement récent, les compliance officers sont perçus à tort comme des "empêcheurs de faire du business en rond". Or, au regard du montant des sanctions pouvant être prononcé en cas de violation des règles de compliance, la lutte contre la corruption est au contraire devenu le principal outil de protection d’une société dans un environnement juridique de plus en plus strict et un environnement réglementaire de plus en plus contraignant.

La loi Sapin II peut-elle faire bouger les lignes en France ?
A. L. : C’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour les sociétés. Une mauvaise car cette loi vient encore durcir les sanctions et ajouter une couche réglementaire pour les entreprises, et une bonne car les compliance officers auront désormais un cadre dans lequel intervenir, ainsi qu’une base locale pour expliquer en interne qu’il ne s’agit plus du problème des autres, mais d’enjeux qui se posent aujourd’hui et maintenant pour chaque société française agissant en France ou à l’étranger, et pour chaque société étrangère ayant des opérations en France.

Compliance Hogan Lovells Antonin Lévy