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RSE : un enjeu stratégique et croissant pour les directions juridiques

Par Aurélia Granel

De Gaulle Fleurance & Associés, en partenariat avec l’Association française des juristes d’entreprise (AFJE), dévoile les résultats de son Observatoire des directions juridiques 2022. Parmi les 120 directeurs juridiques interrogés, la tendance est nette : 17 % de leur temps est désormais consacré à la mise en place du cadre RSE dans leur entreprise. 

Taxonomie européenne afin d’orienter les investissements vers les activités vertes, déclaration de performance extra-financière obligatoire pour les grandes entreprises, devoir de vigilance pour prévenir les risques sociaux et environnementaux, loi Sapin 2 pour mieux détecter la corruption, loi Pacte donnant la possibilité aux entreprises de se doter d’une raison d’être ou d’adopter le statut d’entreprise à mission… Les enjeux de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) prennent une place croissante dans l’entreprise, avec l’évolution récente de la réglementation.

Ils sont désormais intégrés au plus haut niveau des directions générales : 81 % d’entre elles suivent de manière étroite la mise en place du cadre RSE dans leur entreprise. Les directions juridiques y consacrent, quant à elles, 17 % de leur temps, selon les résultats de l’Observatoire des directions juridiques 2022. « Sept directeurs juridiques sur 10 étant rattachés au directeur général ou au président de leur entreprise, ces nouveaux enjeux les amènent à travailler avec une plus grande proximité encore avec leur gouvernance », souligne Stéphane Baller, of counsel du cabinet De Gaulle Fleurance & Associés et auteur de l’étude.

Une acculturation progressive

À la question de l’évaluation du degré de maturité de leur direction juridique en matière de RSE, 37 % des directeurs juridiques sondés estiment être en réaction par rapport aux textes légaux et 29 % sont en phase d’étude pour mettre en place des procédures et des outils. Seuls 13 % d’entre eux estiment être visionnaires avec une approche stratégique et optimisée qui leur permet de mettre la RSE au coeur du fonctionnement des procédures juridiques.

Par ailleurs, si 40 % des répondants n’ont pas encore travaillé sur la raison d’être de leur entreprise, 28 % en ont adopté une et 31 % l’envisagent pour l’avenir. Quant au statut de société à mission, il est très peu cité (3 %), les directeurs juridiques jugeant ce choix trop ambitieux pour leur entreprise. La moitié des directions juridiques (53 %) ont accompagné leur entreprise, dans le prolongement de la loi Pacte, dans l’évolution de ses pratiques, notamment en matière de rémunération des dirigeants en intégrant les aspects RSE dans les critères d’évaluation de la performance. Notons que la loi relative au devoir de vigilance mise en place en 2017 a changé les pratiques de près d’une direction juridique sur deux (43 %), y compris dans certaines sociétés qui ne sont pas encore concernées, notamment en renforçant leur niveau de connaissance des fournisseurs, des tiers et des filiales.

La crise sanitaire a changé la donne, 58 % des directeurs juridiques déclarent observer un intérêt accru de leurs salariés sur les questions de RSE. Il en est de même pour les actionnaires, selon 56 % d’entre eux. Et, pour 54 %, la prise en compte de l’empreinte digitale de l’organisation s’est accrue. Elle recouvre la gouvernance et la protection des données, l’empreinte carbone, ou encore les règles éthiques concernant l’usage de l’intelligence artificielle. « La RSE prend une place grandissante dans les entreprises qui ont intégré qu’une croissance rentable est aussi une croissance responsable. Et c’est une tendance forte : rappelons que la directive CSRD introduira bientôt des évolutions conséquentes pour renforcer la place des enjeux de développement durable dans la stratégie, la gouvernance et la gestion des risques des entreprises. Identifier les leviers qui permettent de réaliser des boucles de durabilité demande du temps et des régulations adaptées. Les juristes d’entreprise savent précisément servir cette médiation entre la norme et la réalité de terrain », indique Jean-Philippe Gille, président désigné de l’AFJE. Autre évolution notable : 53 % des directions juridiques ont dû gérer, pour leur entreprise, un contrôle de la part d’une autorité administrative au sujet d’un enjeu RSE, au cours de l’année écoulée.

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est intervenue sur près de la moitié (47 %), l’Agence française anticorruption en ayant contrôlé 20 %, la Commission nationale informatique et liberté étant intervenue chez 9 % d’entre elles. Sont aujourd’hui signalées les premières interventions de l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information.