La méthode PNF
À l’occasion de l’audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Paris, le 23 janvier 2024, Jean -François Bonhert, président du parquet national financier (PNF) a présenté la synthèse de l’activité de son service pour 2023.
Dans son rapport de synthèse et dans son discours, le procureur national financier a annoncé la tenue, en juin 2024, d’une « manifestation d’ampleur » visant à célébrer le 10e anniversaire du service qui, créé par une loi du 6 décembre 2013, a débuté ses activités le 1er février 2014. Jean-François Bonhert a ensuite mis en avant l’activité du service en 2023.
Cette année, le rapport propose un focus sur le traitement des atteintes à la probité, qui constituent l’essentiel des contentieux dont est saisi le PNF. Ces affaires représentent en effet près de la moitié des affaires (47, 15 %) qui ont occupé le service en 2023. Dans le détail, 31 % de ces procédures concernent des affaires de corruption, 21 % relèvent du trafic d’influence, 15 % du blanchiment d’atteintes à la probité. Les dossiers de favoritisme et de détournement de fonds publics représentent chacun 12 % du total et ceux de prise illégale d’intérêts 9 %. Après les atteintes à la probité, ce sont surtout celles aux finances publiques qui mobilisent les parquetiers avec une proportion de 43,15 % des dossiers. Les autres contentieux demeurent encore anecdotiques avec 5,44 % pour les abus de marché, 3,23 % pour des affaires diverses et 0,52 % en matière de concurrence. Si le PNF dispose, depuis 2021, d’une compétence dans ce dernier domaine, les craintes des praticiens de voir le contentieux de la concurrence revenir dans le giron du pouvoir pénal ne semblent donc pas justifiées, pour le moment1. En tout cas du point de vue statistique.
Des moyens renforcés
Dans son discours, le procureur national financier s’est félicité des moyens mis à sa disposition en 2023 pour mener à bien ses missions. L’effectif de magistrats s’élève désormais à 20 personnes, qui travaillent en binôme, soit 2 de plus que l’année d’avant, au cours de laquelle leur arrivée avait été annoncée. Chacun d’entre eux a en portefeuille 90 dossiers en moyenne, comme l’année dernière, car le nombre de procédures traitées, qui s’élevait à 708 en 2022 a bondi à 781 en 2023. L’effectif d’assistants spécialisés est passé de 6 à 8 en 2023, ce qui, d’après l’explication du procureur, a permis d’internaliser environ 10 % des procédures. Ce sont désormais 12 % des procédures ouvertes en 2023 qui sont initiées par le PNF lui-même contre 10,88 % l’année d’avant. L’essentiel des procédures (40 %) provient toutefois des différentes autorités publiques, de dessaisissements à son profit (9 % du parquet de Paris et 12 % d’autres parquets).
Résultat 2023
On notera avec intérêt qu’en 2023, le nombre de personnes condamnées dans les affaires qui se sont terminées s’est élevé à 111 personnes, une forte augmentation (+58,6 %) par rapport aux 70 de l’année précédente. Quelque 16 d’entre elles sont des personnes morales et 72 sont des personnes physiques qui ont fait l’objet d’une condamnation par la 32e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Parmi ces personnes physiques condamnées, 39 l’ont été dans le cadre d’une CRPC. Par ailleurs, 71 personnes ont été condamnées à une peine complémentaire d’interdiction d’activité professionnelle contre 19 auparavant.
S’agissant des personnes physiques poursuivies par le tribunal correctionnel, le taux de relaxe reste en dessous des 10 % (9,9 %). Cette année cependant, le PNF a obtenu des sommes moindres pour le Trésor public, le total des amendes, confiscations, dommages et intérêts et sommes issues des redressements fiscaux s’élevant à 482,8 M€, contre plus du triple l’année dernière.
Le pionnier national
En dressant le bilan de 10 années d’existence, Jean-François Bohnert a par ailleurs rappelé que la création du service a donné un souffle nouveau à la justice pénale, en introduisant de nouveaux outils et de nouvelles méthodes. Tout d’abord, c’est le PNF qui a généralisé le traitement des procédures grâce à l’enquête préliminaire, il en a d’ailleurs fait sa marque de fabrique. Ces enquêtes ont de surcroît été ouvertes au contradictoire, permettant un dialogue fécond entre les personnes visées par les enquêtes et l’autorité répressive avant l’engagement de poursuites, plus adaptées à la réalité des faits. Par ailleurs, la création en 2016 de la convention générale d’intérêt public (CJIP) a également modifié le paysage judiciaire français, introduisant de nouveaux rapports entre les justiciables et l’autorité de poursuite. Une partie du rapport est d’ailleurs consacré à ce nouvel outil et rappelle que depuis octobre 2017, le PNF a conclu 20 CJIP, dont 5 en 2023. À l’exception de 3 d’entre elles considérées comme exceptionnelles, le montant moyen des amendes d’intérêt public prononcées dans ce cadre s’élève à 53 M€. T