Accélérer le M&A avec l’IA
L’usage de fonctionnalités d’IA par les professionnels du droit marque un tournant majeur. Confrontés à une inflation documentaire constante et à des délais de plus en plus serrés, l’automatisation de certaines tâches chronophages leur promet des gains de temps et par conséquent une réduction des coûts. Explications par Grégoire Hanquier, ancien directeur juridique, devenu il y a moins d’un an directeur produits et production chez Lamy Liaisons – Karnov Group.
En quoi l’intelligence artificielle peut-elle révolutionner le M&A pour les professionnels du droit ?
En automatisant des tâches complexes, telles que la due diligence ou l’analyse de risques contractuels, l’IA ne se contente pas de simplifier le processus : elle redéfinit la frontière entre expertise humaine et performance technologique. Cependant, cette avancée technique soulève une question essentielle : comment préserver l’essence du raisonnement juridique face à l’efficience de l’IA ? Mon rôle avec mes équipes est d’augmenter leur capacité à exercer leur discernement, en intégrant ces outils dans une vision éthique et pragmatique du droit, où technos et richesse de nos contenus se conjuguent toujours.
Sur quelles tâches répétitives précises,
l’IA va-t-elle avoir un impact direct ?
Avec Lamyline New, enrichie nativement avec l’IA et alimentée par les contenus experts et pratiques de Lamy Liaisons, plusieurs étapes clés des transactions ont été repensées.
La due diligence, souvent considérée comme le cœur névralgique des fusions et acquisitions, illustre bien ces avancées : l’IA y accélère l’identification des clauses critiques et extrait avec précision les informations essentielles des documents juridiques. Ce processus, autrefois chronophage et sujet à erreurs humaines, devient plus fiable, garantissant des analyses de qualité.
L’IA intervient également dans la comparaison de documents juridiques, en mettant en évidence les différences subtiles et les altérations sémantiques. Elle assure ainsi une maîtrise des variations contractuelles. La sécurité des transactions est renforcée grâce à une vérification automatisée des chaînes de pouvoir, via un partenariat avec Pappers. Ce contrôle garantit que les engagements sont juridiquement solides.
À horizon Q2 2025, nous irons encore plus loin : l’outil sera capable de générer automatiquement des documents juridiques, tels que des mémos, des clauses ou des contrats complets. Ce saut technologique augmentera la puissance rédactionnelle, tout en permettant à la négociation et à la stratégie de continuer à pleinement s’exprimer.
Pourtant, la maturité des équipes M&A demeure faible face à l’IA. Comment l’expliquez-vous ?
La faible maturité des équipes face à ces outils reflète une inquiétude légitime : celle de préserver leur expertise et la confidentialité des données. Les avocats M&A, experts dans la négociation et la rédaction de contrats complexes, perçoivent souvent les outils tiers avec méfiance. La question clé reste : que devient la documentation une fois intégrée à ces plateformes ?
Cette prudence, loin d’être un frein, ouvre une réflexion essentielle sur le rôle des éditeurs juridiques. Chez Lamy Liaisons, des engagements clairs ont été pris pour lever ces barrières. Les contrats téléchargés ne sont conservés que le temps strictement nécessaire aux actions des utilisateurs et ne servent jamais à entraîner nos modèles. Les contenus générés restent sous le contrôle exclusif des utilisateurs. Les échanges sont hébergés aux Pays-Bas, en conformité avec le RGPD.
Une transparence totale est assurée via des conditions générales d’utilisation précises sur les droits liés aux contenus générés. Cette approche pose les bases d’une collaboration durable entre expertise humaine et technologie, où l’IA devient un outil de confiance pour les juristes.
Pourquoi est-il indispensable que les acteurs du droit se saisissent dès à présent de ces outils technologiques pour traiter de leurs dossiers M&A ?
Les directions juridiques se saisissent actuellement à plein de l’IA et lancent des programmes d’intégration de cet outil technologique dans leurs services. Leur objectif est d’automatiser les tâches chronophages pour permettre aux équipes de se concentrer sur des actions à valeur stratégique.
Il est intéressant de noter l’évolution de l’approche du M&A par les directions juridiques, qui « subissaient » auparavant les dossiers et, pour la plupart, les externalisaient totalement à des cabinets. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. D’abord parce qu’elles se sont étoffées en interne en recrutant des profils issus du barreau d’affaires, mais aussi parce qu’elles élèvent le niveau de leurs équipes, qui se concentrent uniquement sur la valeur ajoutée des dossiers à traiter.
Dans ce cadre, les cabinets d’avocats doivent accélérer au même rythme pour ne pas prendre de retard par rapport à leurs clients. Il ne faut pas craindre que demain l’IA remplace l’avocat, c’est plutôt celui qui travaillera avec l’IA qui remplacera celui qui s’y refuse.
Quelle est donc votre préconisation
pour les cabinets d’avocats ?
Les cabinets doivent avant tout identifier les tâches spécifiques où l’IA peut réellement répondre à un besoin concret, car il ne s’agit pas de faire de l’IA pour le principe. Cette adoption doit être réfléchie et alignée sur les attentes de leurs clients. Cela passe aussi par une montée en compétences des équipes : les avocats doivent être formés pour comprendre comment l’IA peut transformer leur activité et enrichir la relation client. T