Valérie Gomez-Bassac propose « Un code européen des activités économiques »
Alors que la députée, précédemment avocate et vice Doyenne de la Faculté de droit, Valérie Gomez-Bassac auditionne France Stratégie et des économistes, pour la mission que lui a confiée le Premier Ministre sur le code européen des affaires, le gain d’une unification juridique du marché européen est chiffré.
Ses expériences lui ont permis de constater « qu’un marché unifié en Europe n’existait pas. On a autant de marchés que d’états et cette unification économique est imparfaite. L’harmonisation du droit des affaires en Europe devait être évaluée pour définir les marges de progression potentielles ainsi que les perspectives qu’elle se mette en œuvre politiquement en Europe ». Avec ce chiffrage, elle s’est sentie confortée dans son engagement pour un code de droit des affaires harmonisé pour tous les acteurs économiques de l’Union Européenne. En effet, la mise en place de règles unifiées permettrait une augmentation de 35 à 40 % des échanges commerciaux intracommunautaires et le pouvoir d’achat des Européens pourrait connaitre une augmentation moyenne d’environ 14 %.
Avec ce code, le droit serait un outil pour stimuler davantage l’économie et redonner sens en l’Europe.
Valérie Gomez-Bassac entend « placer le droit au cœur de la construction européenne et consolider l’Union économique et monétaire en l’adossant à un droit des affaires unifié pour en faire des priorités pour redynamiser l’Union européenne ». Ce code apparait comme une évidence, peu contestée lors des auditions et nullement après une présentation du rapport. « Au-delà de l’élaboration d’un code européen du droit des affaires, ces échanges ont permis d’illustrer à la fois l’impact économique attendu d’une harmonisation dans le droit des affaires mais aussi de certaines évolutions connexes qui contribueraient à une meilleure stabilité de notre Union européenne » souligne le rapport. « Ce n’est pas du « juridisme » qu’il faut faire. Il nous faut répondre aux besoins des acteurs. Faire quelque chose pour et par les universitaires et les théoriciens juristes ne donnera pas le meilleur résultat. Il faut que ce projet soit aussi porté par le monde économique, dans un travail collectif de co construction » prévient la députée. Cela a motivé son choix pour une approche bottom-up et de terrain. Elle a auditionné avant tout des chefs d’entreprises, leurs représentants et les praticiens (avocats, juristes d’entreprise…) qui les accompagnent. Les difficultés qu’ils ont rencontrées pour se développer dans d’autres pays de l’Union européenne sont reprises dans son rapport. Elle a souhaité s’appuyer sur les travaux déjà fort avancés de l’association Henri Capitant et la Fondation pour le droit continental entre autres, pour les aspects contenus notamment. Analysant les échecs précédents, notamment sur les projets d’harmonisation globale du droit (donc une approche de contenu), elle a proposé plusieurs approches et plusieurs méthodes pour constituer ce code.
Un code des activités économiques
« Une fois le terme de “code” retenu, il convient de lui juxtaposer la notion “d’activité économique” pour sa dimension européenne et fonctionnelle ». Si l’usage de la terminologie du code est évidente « parce que tout le monde sait ce que c’est et que la notion est rassurante », celui « d’affaires » est plus contesté. Le terme « activité économique » apparaît à Valérie Gomez-Bassac plus en phase avec « la multiplicité des champs concernés, la différence entre les acteurs cibles et les différents domaines du droit. Cela permet d’englober aussi les associations, les professionnels libéraux, l’économie sociale et solidaire… Mais surtout, il s’agit d’une notion utilisée par la Cour de Justice de l’Union européenne qui est communément admise. » Elle s’appuie pour cela sur les treize domaines de droit identifiés par l’Association Henri Capitant : Concurrence, Distribution, Sociétés, Sûretés, Exécution, Entreprises en difficulté, Bancaire, Assurances, Marchés financiers, Propriété intellectuelle, Commerce électronique, Social, Fiscalité. Autant de livres pour ce code, même si les domaines fiscaux et sociaux ne sont pas prioritaires pour « laisser le temps au temps ».
Comment surmonter les obstacles liés à 28 législations différentes pour créer un marché unique et unifié en Europe ?
« Il ne s’agit pas de substituer un code européen aux droit nationaux » souligne la députée, elle propose plutôt de travailler selon 3 axes, qui se complètent, mais peuvent aussi se traiter distinctement.
1 : une compilation, pour rassembler les normes existantes : règlements, directives, transposition des directives dans chaque état membre, éventuellement dans les différentes langues. D’abord un travail d’inventaire afin de rendre plus lisible le droit des activités économiques pour les petites et moyennes entreprises, les commerçants, les artisans et le secteur de l’économie sociale et solidaire. Aujourd’hui cet accès est compliqué « EurLex n’est pas Légifrance ». Et faire évoluer le portail N-Lex devrait permettre « une accessibilité linguistique et culturelle des normes nationales ».
2 : une codification-modification là où des ajustements et des modifications de normes sont nécessaires. C’est particulièrement vrai en Propriété Intellectuelle et en droit de la distribution. Cela permettrait aussi de traiter les doublons, voire les contradictions entre les normes existantes. Ce serait basé sur une analyse des besoins de l’entreprise pour une adoption d’outils adaptés.
3 : un outil pour offrir aux PME et TPE une forme juridique (SASE, société par actions simplifiées européenne) reconnue dans tous les Etats membres qui permettrait de développer la compétitivité des agents économiques et leur dynamisme par une appellation communément admise. Cette SASE serait accompagnée de contrats-types liés spécifiquement à cette forme juridique : bail, contrat d’assurance, prêt, CGV…
Bien accueillies, ses propositions vont être analysées, triées, priorisées par les ministres concernés et Valérie Gomez-Bassac veillera à leur accomplissement. Les planètes n’ont jamais été si bien alignées pour lancer une harmonisation du droit des affaires en Europe !