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17e colloque de la commission des sanctions de l’AMF

Par Anne Portmann

La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) tenait mardi 24 septembre 2024 sont traditionnel colloque annuel, au cours duquel des intervenants ont débattu de l’application du principe du contradictoire devant elle et de la répression de la diffusion d’informations fausses ou trompeuses par les émetteurs.

C’est la nouvelle présidente de la commission des sanctions, Valérie Michel-Amsellem, qui a inauguré cette après-midi de débats, rappelant que les membres de la commission, renouvelés en février 2024, assistaient ainsi à leur premier colloque. Dressant le bilan de l’activité de l’année passée, elle a indiqué que la commission avait rendu seulement 14 décisions de sanction, en raison de l’interruption de ses travaux durant le premier trimestre 2024, le décret de nomination des nouveaux membres étant intervenu tardivement. Le montant des amendes s’est toutefois élevé à la somme de 8,60 M€, ce qui reste dans la moyenne de ce qui est prononcé chaque année.

Après une rapide revue des décisions de la commission en lien avec les débats à venir, elle a insisté sur le renforcement de l’aspect pédagogique des sanctions prononcées par la commission, qui participe de leur efficacité, estimant que les décisions devaient être claires et simples à lire et que des réflexions étaient en cours concernant la communication à destination du grand public.

De l’application du principe du contradictoire

La première table ronde, modérée par Sophie Schiller, universitaire et membre de la commission, rassemblait Maxime Delorme, directeur des affaires juridiques de l’AMF, Marie-Christine Daubigny, présidente de la commission des sanctions de la Haute autorité de l’audit (H2A) et l’avocat Éric Dezeuze, associé du cabinet Bredin Prat. Les intervenants ont échangé sur l’application du contradictoire devant la commission des sanctions. Il a notamment été rappelé que si, devant la commission, le contradictoire n’a pas vocation à s’appliquer au stade de l’enquête et du contrôle, les opérations doivent néanmoins se dérouler de façon loyale et ne pas porter grief à la personne susceptible d’être mise en cause. C’est d’ailleurs sur ce fondement que les avocats contestent les opérations de contrôle et de saisie. Maxime Delorme souligne qu’en pratique, des éléments de contradictoire ont été introduits lors de ces phases préliminaires telles que l’envoi de la lettre circonstanciée, à l’issue d’une enquête, à laquelle les personnes mises en cause peuvent répondre. De même à la suite d’un contrôle, le rapport est envoyé au mis en cause et ses observations y seront annexées et envoyées à la commission. Lorsqu’un ancien dirigeant est susceptible d’être poursuivi, l’AMF lui adresse une lettre de synthèse contenant des extraits du rapport. Il est toutefois délicat, en pareil cas, de communiquer des éléments confidentiels, alors qu’il n’existe pas de secret de l’instruction devant le régulateur, contrairement au droit pénal. C’est pourquoi les intervenants ont appelé à l’instauration d’un « contradictoire aménagé », avec un dispositif de protection qui permettrait de sanctionner la communication de ces éléments à des tiers à la procédure afin de favoriser le partage d’informations entre mis en cause. Éric Dezeuze a cependant relativisé cette absence de contradictoire lors des phases préliminaires, rappelant que les avocats pénalistes, habitués à l’absence de contradictoire en procédure pénale jusqu’à une époque récente, n’étaient pas particulièrement choqués par les pratiques devant l’AMF.

Informations fausses ou trompeuses

La deuxième table ronde, animée par Xavier Samuel, conseiller à la Cour de cassation et membre de la commission des sanctions, réunissait l’avocat Éric Boillot, associé du cabinet Rossi Bordes, Samia Sellal, directrice juridique de Dassault Systèmes et Astrid Milsan, secrétaire générale adjointe de l’Autorité, qui débattaient de la diffusion d’informations, financières ou, désormais extra-financières fausses ou trompeuses par les émetteurs, dans le cadre des abus de marché. Éric Boillot a débuté par les fondements juridiques de la sanction de cette infraction, à savoir les dispositions de l’article 12-1-C du règlement du Parlement européen sur les abus de marché (MAR) et a rappelé que ces dispositions, qui visent les personnes morales et les dirigeants, s’appliquent aussi aux tiers, comme les journalistes ou les commissaires aux comptes. L’omission de diffuser une information peut également être sanctionnée, en cas de manque de clarté sur le périmètre d’un chiffre d’affaires par exemple. Samia Sellal a indiqué que pour conserver la confiance des investisseurs, la sincérité de l’information émise est en effet un principe cardinal. Le panel s’est ensuite interrogé sur la situation des dirigeants des émetteurs sanctionnés à ce titre, le règlement permettant de rechercher la responsabilité des personnes physiques qui ont pris part à la décision de diffuser l’information. « Il importe d’examiner comment s’organise la communication financière au sein de l’entreprise », a indiqué Astrid Milsan qui a par ailleurs évoqué l’entrée en vigueur de la directive CSRD et de la diffusion d’informations extra-financières. Elle a précisé que conformément à la pratique désormais habituelle des Autorités, l’AMF examinerait les premiers rapports émanant des entreprises, en 2025, avec bienveillance, avant de sanctionner.

La présidente de l’AMF, Marie-Anne Barbat-Layani, a clôturé le colloque, rappelant, elle aussi, l’importance de mener des actions pédagogiques préalables aux sanctions pendant un temps avant de sanctionner afin d’acculturer les entreprises à de nouvelles normes.Informations : www.amf-france.org/