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Philippe Portier : "il ne sert à rien de vouloir lutter contre l'économie collaborative."

Par Laurence Garnerie
Philippe Portier, avocat associé et membre du conseil de gérance de Jeantet


Alors que le terme d'« ubérisation » est sur toutes les lèvres, le cabinet d'avocats Jeantet lance DigitLegal, un blog consacré à la numérisation de l'économie et du droit, doté d’un fil Twitter dédié @digitlegal. Explications avec Philippe Portier, associé et membre du conseil de gérance du cabinet.

Quelle est la genèse du blog DigitLegal ?
Philippe Portier : C’est une convergence de plusieurs facteurs. En début d’année, nous avons développé notre département IP/IT en recrutant un nouvel associé, Frédéric Sardain, très actif sur les problématiques liées au numérique. Par ailleurs, depuis plusieurs mois, Jeantet est très sollicité par des clients divers sur les nouveaux modèles liés à l’économie numérique. Cela nous a conduits à mener des actions de lobbying sur le sujet et des opérations de communication, comme l’organisation d’une conférence de presse avec l’AJEF sur le rapport Terrasse en février dernier ou des ateliers sur l’ubérisation de la filière agroalimentaire lors du Salon de l’Agriculture. Simultanément, le cabinet a décidé de revoir sa charte graphique et son site, et d’ancrer davantage son discours dans l’innovation et les nouveaux médias. La combinaison de tous ces éléments nous a amenés à penser qu’un blog, accompagné d’un compte Twitter, était une bonne manière de participer au débat sur l’économie numérique.

Quel est l’esprit de ce blog ?
P.P. : Nous voulons décrypter et analyser les tenants et aboutissants de l’économie collaborative. Il ne sert à rien de vouloir lutter contre ce mouvement car il est dicté par le consommateur. Cependant, il ne peut pas se développer sans cadre et nous souhaitons apporter avec recul les réponses aux questions qui entravent son évolution. Qu’est-ce qui relève du professionnel ou de l’occasionnel par exemple ? Il y a un besoin de démarcation et de règles (fiscales, sociales, réglementaires) claires sur cette question. Nos clients sont à la fois des acteurs de l’économie collaborative et des opérateurs historiques. Nous voulons donc œuvrer à l'émergence d'un dialogue équitable entre eux.

Comment les membres du cabinet participent-ils à ce blog ?
P.P. : Nous avons constitué un groupe de travail sur l’économie collaborative, regroupant les différents spécialistes, en droit de la concurrence, droit fiscal, droit social et règlementations, qui rédigent des articles chacun dans leur matière. Mais nous essayons d’entraîner tout le monde et nous avons même organisé une formation en interne à cette fin. Toutes les pratiques sont concernées par les problématiques que rencontrent les nouveaux entrants sur un secteur donné (hôtellerie, transports, alimentation, professions réglementées,…), bloqués dans leur développement par les corporatismes.

Quel regard portez-vous sur l’émergence de plateformes numériques faisant concurrence à la profession d’avocat ?
P.P. : L’ubérisation s’attaque tout d'abord à des monopoles sans valeur ajoutée. Si des acteurs ont pu émerger en proposant des offres à moindre coût, c’est qu’il y avait une place à prendre. Sur la question des modèles d’actes en ligne par exemple, le problème de l’avocat ne doit pas porter sur l’acte lui-même, mais sur son travail de conseil qui, lui, n’est pas modélisable. Nous sommes aujourd’hui poussés à faire notre travail de mieux en mieux pour éviter de nous faire comparer à des algorithmes.

Propos recueillis par Laurence Garnerie 
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