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Une deuxième décision de l’Agence française anticorruption riche d’enseignements  

Par Thibault Jézéquel, counsel, Racine Avocats

Le 7  février dernier, la Commission des sanctions de l’Agence française anticorruption (AFA) a rendu sa deuxième décision (soit un peu plus de six mois après la première). Celle-ci a fait l’objet d’une publication sur base anonyme sur le site internet de l’AFA mais le nom du groupe visé a très largement fuité dans la presse.

Si la première décision apportait des précisions sur la procédure de l’AFA et sur cinq des huit piliers des programmes de conformité anticorruption que les entités ou groupes (société(s)) visés par les dispositions de l’article 17 de la loi Sapin 21 sont tenus de mettre en œuvre, cette deuxième décision apporte des précisions utiles à la fois sur la procédure et sur les trois piliers suivants : la cartographie des risques de corruption, le code de conduite et les procédures de contrôles comptables. Ces éléments seront utiles pour les sociétés en vue d’ajuster leurs programmes et mieux interpréter des règles laissant parfois de grandes marges d’interprétation.

Sur la procédure, on pourra, notamment, relever que l’AFA poursuit sa jurisprudence en matière de régime probatoire. Pour rappel, les sociétés peuvent, soit justifier du respect de leurs obligations en démontrant qu’elles ont suivies les recommandations de l’AFA, soit décider de ne pas suivre ces recommandations en adoptant une autre démarche. Dans le premier cas, il appartient à la poursuite de démontrer en quoi les recommandations de l’AFA n’ont pas été suivies. Dans le second, la société doit être en mesure de justifier la validité et la pertinence de sa démarche.

Il est également intéressant de relever que, pour caractériser un grief, le directeur de l’AFA ne peut pas s’appuyer sur la méconnaissance de prescriptions formelles ou méthodologiques qui ne figureraient pas dans les recommandations de l’AFA. De même, il ne peut s’appuyer sur la méconnaissance d’obligations que les recommandations de l’AFA auraient ajoutées aux dispositions légales.

Sur le fond, cette deuxième décision apporte plusieurs éclairages utiles :

tout d’abord, en ce qui concerne la cartographie des risques de corruption, la Commission des sanctions de l’AFA précise que, lors de l’identification des risques, les sociétés sont libres de faire participer uniquement les fonctions, métiers ou sites qui leur paraissent représentatifs de leurs activités (i.e. il n’est pas nécessaire, selon les cas, de solliciter l’ensemble des représentants des fonctions ou entités du groupe). Pour les groupes présents à l’étranger, le fait de ne pas traiter dans la cartographie un pays de façon particulière doit être dûment justifié par une analyse précise de sa chaîne de valeurs et de ses activités propres. Par ailleurs, l’absence ou l’insuffisance d’un plan d’actions ne peut permettre de caractériser un manquement dans la mesure où il ne s’agit pas d’une obligation légale. Il en est de même de la fréquence de mise à jour de la cartographie : celle-ci n’a pas besoin d’être annuelle, sous réserve que la pertinence de la périodicité retenue par la société puisse être démontrée ;

ensuite, s’agissant du code de conduite, la Commission des sanctions de l’AFA rappelle que celui-ci peut être constitué d’un document unique ou de plusieurs documents. Dans ce dernier cas, les documents doivent former un ensemble cohérent, clairement articulé, dont la lisibilité est assurée auprès du personnel et doivent être annexés aux règlements intérieurs des entités françaises. Ils doivent mentionner qu’ils constituent collectivement le « code de conduite » exigé par la loi Sapin 2 ;

Enfin, en ce qui concerne les procédures de contrôles comptables, la Commission des sanctions de l’AFA rappelle qu’elle constate les manquements à la date où elle statue. Si elle peut relever les efforts réalisés pour se mettre en conformité, il n’en demeure pas loin que ces démarches peuvent ne pas être achevées à la date de prononcé de sa décision.

En conclusion, deux injonctions ont été prononcées par la Commission des sanctions concernant le code de conduite et les procédures de contrôles comptables. Celle-ci se prononcera à une date postérieure aux échéances d’exécution de ces injonctions sur la persistance, ou non, des deux manquements. 

Notes

(1) Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

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