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LE TOP 40 des AVOCATS DU CAC 40

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES

Deux mois auront été nécessaires pour interroger les directeurs juridiques et secrétaires généraux du CAC 40 et réaliser la quatrième édition de cette enquête publiée par Forbes, en partenariat avec la LJA. Avec pour résultat une sélection de 40 hommes et femmes qui ont la confiance des entreprises de l’indice phare de la place de Paris.

L’édition 2024 du top 40 des avocats du CAC 40 a été profondément remaniée par rapport à l’an passé. Ce sont 101 noms d’avocats qui ont été cités par les directeurs juridiques et secrétaires généraux. Quarante d’entre eux ont reçu le plus grand nombre de voix et ont intégré le classement final. Parmi eux, 28 hommes et 12 femmes – en progression de deux par rapport à l’année dernière.

Les marches du podium sont assez similaires à celles de l’année 2021. Benjamin Kanovitch et Pierre-Yves Chabert sont les incontournables des dossiers M&A. Le premier étant jugé « rassurant, efficace, très technique et à l’écoute des clients », tandis que le deuxième est qualifié de « plus brillant des avocats de la place. Il a toujours un coup d’avance et témoigne d’une incroyable expérience ». Jacques-Philippe Gunther, spécialiste du droit de la concurrence, est quant à lui remarqué pour « sa vision stratégique des dossiers et son expertise très pointue ».

Le top 10, qui ne comptait l’an passé qu’une seule femme, fait cette année la part belle à deux avocates réputées. Diane Lamarche, spécialiste du contentieux boursier et des sujets de gouvernance est ainsi louée pour « son pragmatisme, sa rapidité et son efficacité ». Mais aussi la pénaliste Claudia Chemarin dont « la remarquable maîtrise des dossiers » est vantée.

La moitié du top 40 est cette année constituée de nouveaux entrants. Parmi eux, 37 sont issus de cabinets full-service et 3 de boutiques de niche. Assez classiquement, les spécialistes des fusions-acquisitions sont largement représentés, tout comme ceux du droit de la concurrence. On notera l’entrée dans le classement de Vincent Daniel-Mayer, avocat fiscaliste, une spécialité qui n’avait jusqu’à présent jamais été citée par les directeurs juridiques. Signe des temps, le droit de l’environnement a également été plusieurs fois mentionné durant l’enquête permettant à Françoise Labrousse, associée de Jones Day spécialisée en la matière, d’intégrer le classement.

UNE PRESSION BUDGETAIRE
SUR LE RECOURS AUX CONSEILS

Cette enquête a également été l’occasion d’analyser l’évolution des relations entre les directeurs juridiques et leurs conseils externes. Car l’efficacité opérationnelle est aujourd’hui le principal objectif stratégique des directions juridiques. C’est ce qui avait été remarqué, en février dernier, dans l’étude européenne réalisée par l’ACC (Association of corporate counsel), en partenariat avec Exterro, qui relevait que 42 % des directeurs juridiques étaient confrontés à d’intenses pressions budgétaires qui les forçaient à obtenir davantage de résultats avec moins de moyens. Quelque 52 % affirmaient d’ailleurs que leur entreprise leur avait demandé, durant les 12 derniers mois, de réduire les coûts de leur service.

Qu’en est-il pour le marché français ? À première vue, les directions juridiques du CAC 40 semblent relativement protégées par cette pression. Notre enquête révèle que, depuis 2 ans, 46,43 % des budgets de ressources humaines juridiques internes ont en effet augmenté, tandis que 35,71 % sont restés stables. De même, près de 52 % des répondants affirment que leur budget total d’honoraires d’avocats a augmenté depuis 24 mois, tandis que plus de 29 % parlent de stabilité. Seuls 20 % des répondants reconnaissent une diminution.

Il serait néanmoins erroné de conclure à une embellie du marché français. Car la proportion de ceux qui ont vu leur budget externe augmenter est exactement la même que ceux qui ne prévoient pas d'externaliser davantage dans les 2 ans à venir (51,85 %). La pression budgétaire sur le recours aux conseils est donc notable. Quelque 37 % des directeurs juridiques du CAC 40 prévoient même de davantage internaliser les compétences. « Nous anticipons une restructuration des directions juridiques avec le renforcement des experts internes », annonce une directrice.

LES MATIÈRES EXTERNALISÉES

S’agissant des matières qui justifient l’internalisation, les réponses sont plutôt homogènes : les contrats, les baux commerciaux, le droit des sociétés, les données personnelles. Sans oublier bien sûr les programmes de compliance. « Au siège, notre équipe compte une quarantaine de juristes dont quinze sont dédiés à la compliance », indique un répondant. Il est donc très loin le temps où les cabinets intervenaient pour mettre en œuvre la stratégie anticorruption de leurs clients. Aujourd’hui, les équipes juridiques internes sont staffées pour concevoir et piloter le déploiement, la mise en œuvre et la mise à jour du programme de conformité en lien avec les fonctions concernées. C’est même une exigence de l’agence française anticorruption. Bien sûr, lorsque le dossier de compliance se judiciarise, un avocat intervient.

Il est en revanche intéressant de noter que la mise en place d’un plan de vigilance est dans la plupart du temps externalisée à un cabinet spécialisé. Les textes sont sans doute encore trop récents pour justifier l’emploi d’une ressource interne et les directions juridiques préfèrent aussi avoir l’analyse et le retour d’expérience d’un conseil.

Au-delà du contentieux qui est par essence traité par les avocats, les directeurs juridiques interrogés indiquent externaliser principalement des matières très techniques, comme l’antitrust, le droit de la distribution, le droit de l’énergie, de l’environnement ou lorsque l’équipe interne a besoin d’un appui sur certaines questions techniques, voire relevant d’un droit étranger. « Nous externalisons les transactions M&A internationales », a indiqué un directeur juridique. « Nous confions les questions de droit boursier à nos avocats, qui interviennent alors en soutien de l’équipe interne », a expliqué un autre.

Et les honoraires demandés par leurs conseils – que l’on sait en augmentation, notamment dans les firmes américaines – les directeurs juridiques ne semblent pas s’en émouvoir. Quelque 63 % d’entre eux estiment le rapport qualité/prix de leurs avocats plutôt satisfaisant, tandis que 26 % le jugent moyennement satisfaisant. Ils ne sont que 3,7 % à les déclarer insatisfaisant. Il faut dire que les entreprises ont déployé un éventail de stratégies pour ajuster leurs factures. Ainsi 63 % des directeurs juridiques du CAC 40 annoncent négocier au coup par coup des rabais. Plus de 22 % des répondants ont recours à des forfaits, tandis qu’environ 11 % précisent avoir négocié les honoraires à l’occasion de la constitution des panels. L’un d’entre eux explique avoir mis en place des abord discounts (accorder à un client un rabais important lorsque l’opération ne se fait pas), à l’image de ce qui se pratique en private equity. Et de justifier : « Il me semble normal que le cabinet assume une partie du risque que son client prend ».